Le Feedback 360° - ou comment dépasser la culture du Top-Down en entreprise

Théophile est responsable commercial régional. Tous les ans, il réalise une évaluation professionnelle avec sa propre manager, la directrice commerciale. Cette dernière le voit une fois toutes les deux semaines, lors d’un point d’équipe.

La directrice de Théophile trouve que c’est un bon commercial ; ses équipes ont des résultats satisfaisants. Néanmoins, elle pense qu’il pourrait s’améliorer en étant un peu plus créatif dans ses démarches de prospection. Elle l’incite donc à suivre une formation en marketing digital.

Mais au quotidien, Théophile travaille aussi avec d’autres personnes, qui n’ont pas été consultées lors de son évaluation annuelle :

  • D’abord, son équipe, qu’il manage, et qui trouve que leur patron gère très mal le stress. À chaque petit coup de pression, il transmet son angoisse, générant une ambiance très tendue et un gros turnover au sein de son équipe.
  • Il travaille également avec d’autres commerciaux responsables de différentes régions. Ces derniers apprécient, mais ils s’inquiètent, car si Théophile ne gère pas ses priorités en se mettant moins la pression, il fera bientôt un burnout.
  • Et enfin, Théophile travaille avec ses clients, qui le trouvent absolument génial, très à l’écoute, et qui en sont tellement satisfaits que le bouche-à-oreille fonctionne très bien pour l’entreprise sur la région de Théophile.

Mais ça, Théophile n’en a pas conscience… et sa manager non plus. C’est bien dommage, parce que s’ils l’avaient su, leurs choix de formation auraient été bien différents.

C’est pour les cas comme celui de Théophile que le Feedback 360° est une super solution.

Ce processus d’évaluation permet à un manager de récolter du feedback de la part de toutes les personnes avec qui il ou elle travaille :

  • Son ou sa N+1 ; mais pas que, car on sort de la logique old school du feedback top-down, en incluant aussi
  • Ses N-1 (donc les personnes qu’on manage)
  • Ses pairs (les personnes avec qui on travaille)
  • D’autres intervenants externes – clients, fournisseurs, partenaires…
  • Et aussi : soi-même ! Car le Feedback 360 démarre avant tout avec une auto-évaluation, que l’on compare ensuite avec les réponses des autres participants au feedback.

Reprenons Théophile et sa manager Héloïse : qu’auraient-ils appris si on avait donné la parole à toutes les personnes concernées par les “soft skills” de Théophile ?

  • D’abord, que Théophile a un excellent rapport avec ses clients. Et donc pour faire entrer de nouveaux prospects, il vaut mieux miser sur le bouche-à-oreille (par exemple, avec un système de parrainage) que sur le marketing digital, qui nécessiterait une formation finalement pas très utile.
  • Ensuite, on aurait appris que Théophile se met trop la pression, et que cela affecte beaucoup son équipe, qui subit son stress. Il est alors plus judicieux que Théophile suive un coaching sur la gestion du temps et la priorisation des projets ; ainsi qu’une formation en management.

Ok, donc le feedback 360° est plus exhaustif et plus objectif.

Mais comment le mettre en œuvre dans votre entreprise, et quelles sont les erreurs à éviter ?

Pour commencer, réalisez un questionnaire passant au crible, notamment :

  • Les aptitudes en gestion de projet
  • Les compétences comportementales
  • Le style managérial
  • Et l’attitude générale

Il en existe de nombreux modèles gratuits sur internet, que vous pouvez adapter à votre entreprise via un Google Form. Attention néanmoins, car les questions ne doivent pas trahir l’anonymat de celui ou celle qui y répond !

Ensuite, chaque collaborateur concerné répond au questionnaire en s’auto-évaluant. Puis, les parties prenantes répondent anonymement au même questionnaire. Et enfin, la personne évaluée confronte les différentes perceptions pour repérer ses axes d’amélioration, et établit un plan de formation réellement adapté à ses besoins.

Ceci étant dit, attention aux dérives.

Le Feedback 360° est un super outil pour améliorer le management et la gouvernance de son entreprise ; néanmoins, mal encadré, il peut tourner au fiasco total.

Première erreur à éviter : la fréquence. Le feedback 360 reste un processus un peu long, qui demande du temps. C’est bien de le réaliser une fois par an, juste avant l’évaluation annuelle. Pas plus.

Seconde erreur à éviter : briser l’anonymat, ce qui risque de créer des conflits – mais aussi de faire perdre confiance aux collaborateurs qui donnent du feedback, qui se montreraient alors moins francs dans la crainte de froisser leur collègue ou manager.

Troisième erreur à éviter : utiliser un éventuel feedback négatif comme critère discriminant pour refuser une promotion ou une augmentation. Le feedback 360 doit être uniquement constructif, et orienter sur les axes d’amélioration. Vous pouvez même choisir de le garder personnel – dans le cas de Théophile, il ne serait alors même pas obligé de partager ses résultats avec sa manager.

Quatrième erreur à éviter : le feedback non constructif, biaisé, voire carrément méchant. Pour cela, un feedback 360 réussi nécessite, d’une part, une formation des personnes qui y participent – la bienveillance et l’objectivité doivent être de mise. D’autre part, la manière dont les questions sont posées doivent imposer des réponses constructives et bienveillantes.

N’oublions pas que c’est aussi l’occasion de donner du feedback positif, sur toutes les qualités de la personne qui se fait évaluer.